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Torero
La technique académique
Le champ audiovisuel forme un ensemble parfaitement cohérent : la photographie organisée par Paúl Gallegos propose une image nette, claire, s'alliant parfois à l'obscur, en intérieur comme en extérieur, à la manière des toreros pour qui les mots pureté, solitude et intimité résonnent dans les arènes. Rien d'original jusqu'ici. Les plans variés subliment le sujet, les ralentis laissent peser une atmosphère un brin larmoyante. La noblesse du torero est ainsi autant rappelée glorieusement qu'observée depuis les polémiques actuelles. Notre rapport à la tauromachie a bel et bien évolué, le documentaire ne peut le cacher. L'empathie se situe donc plus sur l'homme en crise que sur un « rite culturel » en obsolescence.
La musique utilisée renforce aussi les états d'âme du torero plongé dans une étape charnière de sa vie professionnelle et personnelle : la quête d'une voie plus constructive malgré sa dévotion extrême à ce qui était jusqu'à présent une profession. Cette dernière connaît sa proche destruction mais l'art ne s'essouffle pas pour Mariano, lui qui a connu la gloire et affronte sa propre déchéance. La voix de Camarón, cantaor maudit de San Fernando (Tus ojillos negros), le piano de Luis Humberto Salgado avec son Brindis al pasado ou le Amor de mis amores d'Agustín Lara surgissent pour mieux donner à sentir.
Un sujet au présent
Torero rentre-t-il ou pas dans l'Histoire de la tauromachie ? Nous ne saurions y répondre mais une chose est certaine, c'est qu'il est le témoignage de professionnels et/ou d'artistes en voie d'extinction. Certains sont déjà passés à autre chose : la restauration gastronomique, les arts plastiques, le commerce des collectionneurs. Mariano est celui qui semble toujours nostalgique et réfractaire à la reconversion. Il est celui qui tente encore d'obtenir des contrats, qui est en colère contre l'Equateur et qui veut encore essayer de vivre de sa « profession » en Espagne, là où a pourtant bel et bien débuté la fin de la tauromachie. Il est celui qui, au présent, cite Michel Houellebecq alors qu'on lui peint son portrait : « la beauté part comme un torero s'en va pour de vrai à la recherche de ses rêves ». Le spectateur entend rapidement que la nostalgie a envahi l'homme. Même s'il a vécu le « miracle » de la triomphante corrida, il n'en reste pas moins un enfant qui ne veut pas grandir. Et pourtant, la société n'avance pas dans son sens.
Alors ce sujet au présent établit des correspondances, pense à la place de l'artiste plastique dans la société par exemple: les échanges entre les hommes sont nombreux dans le documentaire de Salgado ; parfois philosophiques parfois grossiers ou encore romantiques. Peu à peu, ils laissent place aux dures confessions puis au silence.
Nous souhaitons la bienvenue au documentaire de Nora Salgado dans l'enceinte de l'Institut Cervantes pour ouvrir la 8ème Semaine du cinéma Equatorien à Paris. Le pont entre les trois cultures s'annonce porteur de réfléxions et de nouveaux regards, dans un ici et maintenant qui nous permettra, nous l'espérons, d'en savourer un peu plus son cinéma.
Pour sa septième édition, la semaine du cinéma équatorien va se dérouler entre l'Institut Cervantes de Paris et le cinéma Christine 21, dans le 6ème arrondissement. Elle est organisée par l'Association ARC, avec le soutien du Ministère de la Culture et du Patrimoine de l’Équateur, l’Ambassade de l’Équateur en France et bien sûr l’Institut... Lire la suite