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La Mujer sin piano, Violette d'or 2010

Le jury du festival Cinespaña, présidé par Georges Corraface, a décerné la Violette d'Or du meilleur film à La Mujer sin piano de Javier Rebollo.
La Mujer sin piano
Cette année, 8 films étaient en compétition du festival Cinespaña, des premiers longs métrages (El Idioma imposible, Mal dia para pescar, Lo más importante en la vida es no haber muerto...) mais aussi des réalisations de cinéastes expérimentés telles que Habitación en Roma de Julio Medem ou After d'Alberto Rodriguez. Le jury a fait le choix de l'exigence, de la proposition cinématographique la plus recherchée mais aussi la plus âpre en décernant la Violette d'or à La Mujer sin piano.

Dans ce second film de Javier Rebollo, qui s'était déjà fait remarqué dans les festivals avec Lo que sé de Lola, le réalisateur s'intéresse une nouvelle fois à la question de la solitude et plus particulièrement de celle des femmes, souvent déçues par le genre masculin. Abordé de façon dramatique, le réalisateur allège son propos dans La Mujer sin piano avec des touches absurdes et burlesques. L'actrice Carmen Machi, plutôt connue pour ses comédies, interprète avec justesse cette « Femme sans piano » qui, un soir, décide d'abandonner son foyer conjugal. Le spectateur éprouve la solitude et le désespoir de ce personnage par l'ennui. Un ennui mis en scène par de longs plans fixes, des dialogues minimalistes qui font s'égrener le temps avec lenteur, mais qui donnent aussi l'occasion aux spectateurs de regarder de façon plus attentive et de fixer son regard sur de petits détails.

Les prix d'interprétation

Autre récompense du festival, celui du meilleur acteur décerné à Guillermo Toledo pour son interprétation dans After d'Alberto Rodriguez. Tourné comme un film choral, After nous fait découvrir les à-côtés de trois vieux ami(e)s, en apparence bien dans leur peau, qui se retrouvent à l'occasion d'une soirée. Alberto Rodriguez (Julio) brille par sa drôlerie et son pathétisme sous l'emprise de l'alcool et de l'héroïne. Le prix d'interprétation féminine, décerné aux actrices (Pilar Bardem, Sonsoles Benedicto, Maria Barranco, Mariana Cordero, Rosa-Maria Sardá) de La Vida empieza hoy de Laura Maña, pose question. Si le thème de la sexualité après soixante ans est un sujet intéressant et peu abordé au cinéma, la forme choisie, celle de la comédie lourde et tâcheronne, laisse un goût amer. Les actrices, aussi renommées soient-elles, peinent à tirer quelque chose de ce film formaté par et pour le petit écran.

Elisa K, le coup de coeur

Elisa K, de Judith Colell et Jordi Cadena, est sans aucun doute la sensation de cette édition 2010. Récompensé par un prix spécial du jury au festival de Saint Sébastien, le film était présenté à Toulouse dans la section « Panorama ». Adaptation d'un roman de Lolita Bosch (Elisa Kiseljak), Elisa K raconte un drame subi par Elisa (Claudia Pons), une jeune fille de 14 ans. La première partie, tournée en noir et blanc, est portée par une voix-off littéraire et descriptive qui met à distance le spectateur de l'acte irréparable et de ses conséquences. Cinéma et littérature n’auront jamais été aussi bien associés que dans ce film. Dans la seconde partie, on retrouve en couleur Elisa (Aina Clotet) devenue adulte qui se souvient soudainement du tragique événement dont elle a été victime. Aina Clotet interprète de façon bouleversante la violence de ce souvenir qui émerge telle une bombe à la conscience du personnage. L'émotion suscitée n'est pas sans rappeler celle provoquée par La Soledad de Jaime Rosales, découvert également à Cinespaña en 2007. Judith Colell et Jordi Cadena cherchent eux aussi à sonder la fragilité de l'âme et sa capacité à surmonter un événement dramatique, mais les deux réalisateurs sont allés moins loin dans la recherche formelle, rendant le film accessible à un large public. Espérons qu'un distributeur se décide à sortir prochainement Elisa K sur les écrans français.

Thomas Tertois

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