Interviews

Sicixia de Ignacio Vilar

Il y a des choses qu'on ne peut pas penser avec la tête.  

Sixième film du réalisateur galicien Ignacio Vilar. Sicixia vogue sur la Costa da Morte, hors des sentiers des pèlerins, pour un aller sans retour du spectateur vers Fisterra, Muxía, Camariñas, Sabucedo et autres points de vue les plus naturels les uns que les autres. Une histoire d'amour entre un homme et une femme, pour l' Humanité et la Nature. Un film, entre la fiction et le documentaire, qui résonnera encore longtemps par ses sons, ses accents, sa vie.
Sortie en Espagne: le 25 novembre 2016.

Film découvert le 3 octubre 2016 à l'occasion du 21ème Festival Cinespaña de Toulouse, du 30 septembre au 9 octobre 2016.

Sicixia de Ignacio Vilar
Echange avec Ignacio Vilar.
Le vendredi 7 octobre 2016.

L’origine du film...
Il y a trois ans, avec ma compagne nous avons fait une marche de deux semaines sur les terres de la Costa da Morte. Une forte tempête nous a surpris pendant ce merveilleux voyage, nous étions dans un des lieux les plus vierges d’Europe mais aucune maison à l’horizon pour nous réfugier. La pluie et l’eau des vagues poussées par le vent s’écrasaient sur nous. Nous étions sur la spectaculaire plage de Trece, et la Costa da Morte est entrée en moi pour toujours.

Le son...
Une des expériences les plus enrichissantes de ce voyage était précisémment la richesse des sons de ce merveilleux espace: le rugissement de la mer, le son des vagues qui frappent les impressionnantes falaises, les nuances des sonorités des vents qui se mimétisent et les multiples variétés dialectales du galicien parlé par ses habitants.
Un format hybride entre la fiction et le documentaire...

Sicixia a été conçu pour mettre au service de la narration toutes les possibilités qu’offre le cinéma digital tout comme la langue (le galicien), la direction des acteurs, la photographie, le son et le rythme... Cela nous permet de faire un cinéma plus naturel, spontané, risqué et avangardiste. La technique de tournage, caméra à la main, et l’usage d’une seule lentille, sont des éléments clés pour s’éloigner des artifices cinématographiques et créer un environnement de confiance pour les protagonistes et pour les personnes qui s’interprètent elles-même dans cette fiction inondée de réalité.
Le temps de l’écriture du scénario et de la préparation au tournage...
Curieusement, ce film a été tourné sans scénario. Il s’est tissé au fur et à mesure que l’environnement et les personnes de la Costa da Morte se présentaient à nous et nous inspiraient l’histoire, tout en conservant le fil conducteur de l’enregistrement du son du protagoniste et de la présence obligatoire de la guide locale. Cette technique nous a permis de bénéficier d’une immense liberté créative. Elle se respire dans le film: les émotions apaisent les esprits (toujours éloignés du présent, concentrés sur le passé et le futur) comme le déclare Olalla “il y a des choses qu’on ne pense pas avec la tête”. Par conséquent, la liberté vécue permet d’effleurer la vérité, même si cela implique de vivre aussi dans l’incertitude, l’insécurité et l’angoisse permanente.
Avec votre film, on pense à Murnau, Antonioni, Wenders... Le cinéma est-il une force créative pour vous?
“Tout image renvoit à une autre image”,  Histoire de l’art, E. H. Gombrich.
Les films des grands réalisateurs m’ont conduit à l’amour, à la nature, à l’Homme, au cinéma.
Les acteurs, les marins, les femmes des marins, les anciens, les hommes de la fête “Rapa das Bestas”...
Dans ce film, j’ai essayé que l’actrice et l’acteur principal oublient tout ce qu’ils avaient appris et essaient d’être au même niveau que les personnes qui se sont interprétées elles-même. Pour les marins, les pêcheuses de coquillages, les retraités et les “aloitadores” (Rapa das Bestas), le tournage en cinéma digital nous a permis de tourner de nombreuses heures jusqu’à ce qu’ils en oublient la caméra et rendent perceptible la spontanéïté. Tout s’est fait grâce à un travail préalable de prise de contact, de familiarisation pour leur offrir une ambiance de confiance.
Pressentiez-vous que ce film pouvait être vu au-delà des frontières galiciennes?
Pour tourner ce film, il a été indispensable d’avoir vécu l’essence de la Costa da Morte. Il est nécessaire de se rapprocher de cette réalité sans préjugés et se laisser porter par la force de cet environnement et de ses habitants. Une fois l’expérience de l’immersion réalisée, même du fond de la mer les choses deviennent visibles. Si nous pouvons transmettre dans le film tout ce que cette nouvelle vision nous offre, nous pouvons toucher les spectateurs du monde entier.
Les premières impressions des spectateurs...
Sicixia sortira le 25 novembre au cinéma. Pour l’instant, nous avons les retours des impressions des représentants institutionaux de la Costa da Morte et de la société galicienne (associations, les médias, etc.). Tous affirment que Sicixia a capté l’essence de la Costa da Morte, et que ses sons traduisent fidèlement toutes les nuances acoustiques qui les accompagnent depuis leur enfance. 
Une anecdote du tournage...
Accompagner les marins à la pêche à la senne fut une expérience inoubliable. La journée de travail avait commencé à 20h et quatre heures plus tard nous étions en haute mer pêchant au milieu de vagues de 8 mètres. Faire du cinéma dans ces conditions nous faisait penser à Ulysse et à son Odyssée. Malgrés les nausées constantes de l’équipage, nous avons réussi à obtenir des images dont nous sommes très satisfaits et qui renforcent cette conjonction des trois astres (le Soleil, la Terre et la Lune, que l’on nomme “Sicixia”) et nous transportent vers une “promenade de l’amour à la Costa da Morte”.
Vos débuts dans le cinéma...
J’ai eu la chance de vivre mon enfance dans le village galicien de Castrofolla (Petín de Valdeorras, Ourense). La vie au village, la relation avec la nature et les histoires écoutées dans la “lareira” (maison) ont réveillé et alimenté ma passion pour le cinéma. À 18 ans, je suis allé vivre à Barcelone où j’ai fondé une école de cinéma. Puis je suis rapidement retourné en Galice pour fonder la maison de production Vía Láctea Filmes, avec laquelle j’ai réalisé des longs-métrages et des courts-métrages en 35 mm et en cinéma digital, des documentaires et des séries documentaires pour la télévision. Mon précédent long-métrage, A esmorga (2014) a battu des records d’entrées et a reçu un excellent accueil de la part public et de la critique.
Vidéo


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