Films
Quien a hierro mata
Le spectateur est témoin d'un acte de bonté qu'il ne sait tout d'abord pas expliquer : pourquoi Mario s'occupe-t-il si bien de cet homme qui a causé la mort de tant de personnes ? Il comprendra ensuite que cette compassion apparente relève plus de la haine que de la gentillesse. La trame semble tourner autour du trafic de drogue, alors qu'il s'agit en réalité d'une vendetta qui hante la totalité de ce petit coin d'Espagne si tranquille en apparence. L'heure de la vengeance semble venue pour Mario : son frère a perdu la vie à cause de la drogue vendue par le vieillard qui intègre la maison de retraite. Qui veut la peau d'Antonio Padín ? Mario devrait savoir qu'il est pourtant bien difficile de se faire justice soi-même... Les rebondissements sont incessants, jusqu'au soupir rageur final ; le spectateur est happé, aspiré dans cette histoire où les innocents ne le sont plus. Les flashbacks se rapportant au frère disparu relèvent cependant d'un registre plus proche de la série B que du thriller, dommage.
Quien a hierro mata est sublime pour bien des raisons : d'abord son scénario, tout aussi complexe que son personnage Mario. Mais aussi ses images : aucune mort gore ou choquante, juste un drap maculé de points rouges qui s'agrandissent, alors que le corps fantasmatique s'affaisse, au ralenti. Tout est suggéré, montré sans être montré (sauf la scène de l'accouchement, chastes et sensibles s'abstenir) : la dernière scène restera longtemps gravée dans l'esprit du spectateur. La poésie visuelle si caractéristique du cinéma asiatique est sans aucun doute présente (on ne peut oublier ce chemin de fleurs, en plongée, sublime).
Il est vrai que sans Luis Tosar, le film ne serait pas le même, pas aussi poignant sans doute. Il est aisé de comprendre pourquoi le rôle lui a été confié : après des films tels que Celda 211, El Niño ou encore Toro, Luis Tosar incarne le thriller espagnol contemporain. Ici, pourtant, il n'incarne pas un homme vil de prime abord : sa haine est retenue, contenue, elle explose dans le silence, dans la solitude qui le rapproche de sa vengeance en l'éloignant de sa famille. Un film sublime, captivant, qui ne laissera personne indifférent. Du grand cinéma !
Aurore Kusy
Ces points de vue externes à la France sur des territoires ibériques et latino-américains nous sont offerts par des séances et animations dynamiques à l'image de leurs cinémas. Ils captent le passage du temps et les mouvements des pays de manière artistique. Pour cette édition 2020, Les Reflets axeront les échanges, avec plus d'attention, sur le... Lire la suite