Films
Josep
Pour Josep, le sujet est différent, tout autant que la narration. Comment rendre hommage aux Républicains tout en rendant hommage aux dessinateurs de presse ? Le double pari d’Aurel, nom artistique d’Aurélien Froment, était ambitieux. Par le subterfuge d’un jeune adolescent venu rendre visite à son grand-père mourant, le charme opère. Le vieillard alité raconte l’histoire marquante de sa jeunesse à son petit-fils : avant, il y a bien longtemps, il était gendarme. Il devait faire régner l’ordre dans un camp de réfugiés espagnols, au bord de la mer. Ces hommes, traités comme des animaux, étaient parqués derrière des barbelés : ils étaient plus de 500 000 réfugiés à avoir passé la frontière pour fuir l’horreur espagnole. Les gendarmes étaient chargés de « veiller » sur eux ; des tirailleurs sénégalais les épaulaient dans cette tâche. Serge était l’un des hommes de loi ; de l’autre côté se trouvait Josep Bartoli (1910-1995), communiste, combattant antifranquiste et, surtout, dessinateur de génie.
Le film d’animation réalisé par Aurel s’emploie à dessiner le parcours de cet homme qui a fui son pays, ignorant où se trouve sa femme enceinte et tentant de survivre tant bien que mal dans ces camps de fortune. Par le biais du dessin, rien n’est épargné au spectateur : la mort, la maladie, la souffrance, le traitement inhumain. Les images sont quelques fois peu animées, plus saccadées, plaquées à même l’écran, comme pour évoquer la cruauté et l’efficacité du trait de dessin qui permet de tout dire en très peu d’images. L’animation laisse souvent place à une gigantesque fresque de dessin de presse. Les images se transforment bien souvent en caricature pour mieux servir le propos vindicatif du film : le gendarme Robert devient cochon.
Les comédiens choisis pour prêter leur voix aux personnages du film parviennent parfaitement à rendre l’histoire vivante et réelle auprès des spectateurs ; Sergi López est Josep, Bruno Solo le gendarme, Gérard Hernandez le grand-père. La chanteuse Silvia Cruz, pour sa part, donne de la voix pour créer la magnifique BO du film. Quant à l’histoire de Josep Bartoli, elle était parfaite pour transmettre cette mémoire historique sur la guerre d’Espagne et le dessin de presse. Ce dessinateur catalan, né à Barcelone, commence à dessiner dans les années 1930. Lorsque la guerre éclate, il prend les armes pour combattre le régime dictatorial avant d’être contraint à l’exil en 1939 quand Barcelone est prise par le régime franquiste ; il traverse la frontière et, comme de nombreux autres réfugiés, il est parqué dans des camps. Il réussit à s’échapper et embarque alors pour le Mexique ; il se rapproche de Frida Kahlo et Diego (de)Rivera avant de partir à New-York où il décède en 1995.
Josep raconte l’histoire de cet homme inconnu du grand public ; la majeure partie du film se centre sur son parcours dans les camps du Sud de la France. Les dessins sont tout d’abord en noir et blanc ; ils sont colorés lorsqu’il parvient au Mexique. L’histoire est bien sûr romancée, adaptée pour que le spectateur puisse être emporté et captivé par cette histoire qui ne laisse personne de marbre. Les dessins originaux de Josep Bartoli apparaissent à quelques moments du film, l’un d’entre eux est même l’élément déclencheur qui permet de raviver les souvenirs du passé. Il aurait cependant été intéressant de les reprendre, par exemple, lors du générique de fin pour que nous ayons tous un accès direct à l’œuvre de cet artiste engagé au XXe siècle, tellement contemporain.
Aurore Kusy
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