Films

Mamá

Un Film de Andrés Muschietti
Avec Jessica Chastain, Nikolaj Coster-Waldau, Megan Charpentier, Daniel Kash, Jane Moffat, Javier Botet
Horreur | Espagne, Canada | 2013 | 1h 40min
Fantastic'Arts - Festival du Film Fantastique de Gérardmer (Grand Prix, Prix du Jury Jeunes de la Région Lorraine, Prix du Public), Fantasporto (prix du meilleur film, du meilleur réalisateur et de la meilleure actrice pour Jessica Chastain)
Mamá : L'horreur fantastique espagnole se cherche
Dans le cadre des dernières séances de Cinespaña, les spectateurs ont eu l'occasion de voir ou revoir Mamá, un des plus gros succès mondial espagnol de l'année. Film d'horreur penchant vers le fantastique, première réalisation d'Andrés Muschietti, produit par Guillermo del Toro... Tout cela est bien alléchant, mais attention, déception possible !
Mamá nous livre la rencontre inattendue entre deux jeunes sœurs abandonnées par leur père dans une cabane au fond des bois et une créature aussi maléfique que douée d'instinct maternel. Après cinq ans sans nouvelles des deux fillettes, leur oncle Lucas n'est pas résigné et continue à les chercher. Quand Victoria et Lily sont retrouvées dans la cabane délabrée, sauvages mais encore vivantes, Lucas et sa compagne Annabel, rockeuse et pas mère pour un sous, décident de les adopter pour leur réapprendre à mener une vie normale. Mais le mal rode, et Mamá n'est jamais loin...

Guillermo del Toro n'en finit plus de produire le renouveau fantastique espagnol. Après le succès de L'orphelinat de Juan Antonio Bayona (2007), ou encore du thriller oppressant de Guillem Morales, Les yeux de Julia (2010), c'est au tour du  jeune réalisateur Andres Muschietti de profiter du coup de pouce du maître des productions horrifiques. Petit problème : Mamá n'est pas au niveau de ses prédécesseurs. D'un synopsis de base plutôt alléchant, classique mais sympathique, Andrés Muschietti décide d'égrener tous les clichés du film d'horreur sans se demander si les spectateurs apprécieront cette sensation de déjà-vu. Mamá se cache dans le placard de la chambre des filles, elle sort des murs pour effrayer tous ceux qui commencent à se douter de sa présence. La relation tendue entre les petites et leur mère adoptive atteint également un summum de banalité. On a même droit au psychologue expert en créatures maléfiques et avide de nouvelles découvertes fantastiques. Bref, inutile d'énumérer toutes les facilités dans lesquelles le film tombe trop souvent. Le réalisateur joue plus sur des effets de surprises prévisibles que sur une pression psychologique exercée sur le spectateur. On sursaute souvent, mais les émotions passent à la trappe.

Ceux qui ont appréciés le film défendront Muschietti en plaidant pour lui, la naïveté du réalisateur débutant encore en rodage. Mais un premier film ne doit pas nécessairement se limiter à une histoire sans originalité, avec un scénario simpliste et cousu de fil blanc. La fin atteint ainsi un paroxysme de mauvais goût et de simplicité effrayante, quand Mamá passe d'une menace oppressante et invisible à une créature dégoulinante et titubante qui poursuit la famille en poussant des hurlements ridicules. Par moment, on se demande même ce qu'on fait dans cette salle de cinéma...

Alors ne tombons pas dans la critique facile : il faut reconnaître au réalisateur un certain talent pour la mise en scène, et quelques scènes font mouche. Notamment celle où Lily joue avec Mamá tandis qu'en arrière plan Annabel s'occupe du linge, nous faisant progressivement deviner, par un jeu de caméra bien maîtrisé, que la famille n'est pas seule. On sent que les idées sont là, mais Andrés Muschietti a voulu trop bien faire et n'insuffle pas ce grain de folie qui est la marque des grands films d'horreurs fantastiques. Surprendre le spectateur, l'amener vers une destination pour finalement changer en cours de route, jouer avec ses émotions, voilà ce qu'il manque à Mamá. La déception est d'autant plus forte qu'un producteur comme Guillermo del Toro semble le mieux placé pour comprendre toutes ces subtilités (Le labyrinthe de Pan suffit à nous en convaincre). Alors laissons à Muschietti la chance de se racheter dans son prochain film, et retenons plutôt le succès commercial énorme de sa première réalisation, qui a déjà raflé plus de 146 millions de dollars pour un budget d'à peine 15 millions. Succès ne rime pas toujours avec qualité... Et cela fait bien longtemps que le cinéma d'horreur ne nous a pas surpris.


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