Films
Mort de rire
Un Film de
Álex de la Iglesia
Avec Santiago Segura, El Gran Wyoming, Álex Angulo, Carla Hidalgo, Eduardo Gómez
Comédie dramatique | Espagne | 1999 | 1h38
Sortie en DVD le 03 Octobre 2006
Un drame déjanté qui s’épanouit entre haine et nécessité de l’Autre
Álex de la Iglesia signe, à travers cette histoire burlesque sur fond d'humour grinçant, une vision rétrospective de l'Histoire espagnole qui remonte des décennies 60-70 en avançant progressivement dans l'actualité.
Dans une boîte sordide, Nino interprète pitoyablement son numéro de chanteur face à des légionnaires bruyants, violents qui se comportent en brutes maîtresses du lieu. L'incident (attendu) explose lorsqu'il tue accidentellement leur mascotte, une chèvre. Bruno, criblé de dettes, tente vainement de calmer la situation. Après une visite rapide chez la mère de Nino, avec laquelle il vit et à qui il ne parle plus depuis plusieurs années, les deux rescapés partent pour Madrid afin de passer un casting. Seulement Nino, à l'air quelque peu abruti, fait un blocage sur scène jusqu'à ce que Bruno le gifle d'une manière qui entraîne adhésion et éclat de rire du public. Le comique de leur duo est né. Leur succès va s'accroître au fil des humiliations infligées à l'introverti.
Le show a des répercussions sur leurs vies, notamment dans les rapports avec les femmes « fans » qu'ils rencontrent. En effet, Alex de la Iglesia utilise le climat de répression de la dictature franquiste pour offrir au preneur de claques une revanche magistrale, hors caméra, sur son co-équipier. La liaison avec une femme qu'ils avaient convoitée tous les deux, au profit finalement du meneur, se rompt lors de la fausse arrestation orchestrée par Nino. La lâcheté et la traîtrise de Bruno face à sa compagne engagée dans la résistance vont lui être fatales. Ce dernier réplique devant caméra, en offrant aux spectateurs le privilège de claquer directement son partenaire.
Ce coup monté va constituer la pierre d'achoppement de la haine que vont alors se vouer les deux hommes, alors même qu'ils acceptent d'être dépendants l'un de l'autre par le numéro rémunérateur qu'ils jouent. La violence dégénère dans leurs vies privées. Nino va prendre une terrible revanche télévisée le 23 février 1981, jour de la tentative de coup d'état commandité par le général Armada ; le lieutenant-colonel Tejero va séquestrer ministres et parlementaires au Congrès avec le soutien de gardes civils armés. Cet évènement empêche les producteurs du spectacle d'intervenir pour tempérer le jeu dangereux (l'auraient-ils fait d'ailleurs ?) auquel se prêtent Nino et Bruno. Les règlements de comptes s'achèvent en folie meurtrière sous les encouragements du public.
Alex de la Iglesia, tout en reconstruisant un univers symbolique populaire au travers des mass média, déploie une fois de plus son arsenal de petites méchancetés et décrit une humanité coupable de terribles pulsions de mort. Au-delà de l'humour noir, il réussit le portrait de deux hommes qui ne peuvent ni vivre ensemble, ni se passer l'un de l'autre.
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