Films
Nudo Mixteco
Nudo Mixteco est un film qui mêle finesse d’esprit et mise en lumière du système des assemblées publiques dans un village poussiéreux du Mexique. Un village qui porte le nom de San Mateo, dans la zone du Mixteco.
Des noms porteurs de sens ont également été donnés aux protagonistes du film : Chabela, María et Toña.
Et il y a encore Rosita, celle qui sera entendue et à qui il sera rendu justice malgré le poids du silence des femmes qui l’ont précédée.
Il y a ces hommes qui, pour la plupart, s’agrippent aux jupes des femmes qu’ils n’aiment pas, aux jupons de leur mère, aux culottes de leur nièce juste parce que tout leur est dû, parce que ce qui ne se dit pas les rend plus fort. Et puis il y en a qui les défendent mais là encore, ils les remplacent dans leur propre responsabilité. Et ces femmes, elles les regardent tous, droit dans les yeux, elles les défient avec leur vérité, irréprochables, justes et dignes.
Nudo Mixteco nous lance à la croisée des chemins de femmes qui luttent pour leur liberté et qui vont conquérir le respect, avec force et entêtement tout en assumant les pertes collatérales. Elles marcheront ensemble et se construiront pour un lendemain meilleur. Elles n’échapperont pas au jugement des leurs mais cette fois-ci, dans l’espace et la durée du film, elles en sortiront libérées.
La caméra utilisée est propre, le cadre posé et symétrique. Elle ne cache rien et fait face aux défilés des personnages sans agressivité. La lumière nous provient des plans eux-mêmes : des reflets dans les vitres des voitures, dans les miroirs, des flammes de bougies, de la lune, du soleil, de la peinture blanche d’un bus.
Nudo mixteco nous semble être une réappropriation socio-culturelle de la place de la femme dans le noyau d’une communauté, d’une famille, de sa propre vie. La dureté des situations y est juxtaposée à la féminité des corps, les dunes arides à la moiteur des corps qui s’aiment, le vide d’hommes creux à l’expérience des femmes travailleuses.
L’actrice Ángeles Cruz travaille ici en tant que réalisatrice de son premier film. Un premier film au scénario méthodique, aux dialogues qui libèrent les paroles de ses personnages, assemblés autour de la mort d’une matriarche du village -élément narratif chargé en symbolismes, paroles qui résonnent autant à l’échelle de la narration qu’au-delà du cinéma, dans un Mexique qui défie la violence, le harcèlement, les massacres, viols et incestes du patriarcat ravageur.
Un très beau film où les femmes prennent en main leur vie. A l’image de Rosita dans ce superbe plan où elle fait danser ses mains dans la lumière, les personnages clefs féminins vont s’ancrer dans leur présent selon leur propre choix. Des femmes qui s’enracinent enfin dans leur propre vérité. Des femmes qui se défendent et transforment le « Nudo Mixteco » en « Amor Mixteco ». Bravo à Ángeles Cruz, un regard franc et décidé, une graine plantée entre les racines puissantes des arbres remarquables d’Oaxaca, au féminin, programmé au 9e Festival Viva México 2021 !
Marie-Ange Sanchez
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