Films
Loin d'être un lieu inventé, Zugarramurdi est un petit village situé en Navarre, connu pour ses réunions de sorcières (autrement dit sabbat ou akelarre) dans les grottes de la région. Au XVIIe siècle, des habitants furent accusés de sorcellerie et condamnés au bucher. Tourné dans le village même, ainsi que dans les grottes, le film est le fruit d'un long travail de documentation. Et dès le générique, le ton est donné. Des peintures d'ensorceleuses historiques défilent, jusqu'à celles plus contemporaines, comme Margaret Thatcher par exemple. Alex de la Iglesia ne perd jamais de vue la situation de son pays. Avec pour toile de fond la crise économique espagnole, femmes et hommes s'affrontent dans une impitoyable guerre des sexes et règlent leurs comptes via des dialogues grinçants, des répliques cinglantes et comiques.
Une explosion grotesque et baroque
Avec Las Brujas de Zugarramurdi, Alex de la Iglesia signe donc un film complètement frappadingue, et ce dès la scène d'introduction. Totalement surréaliste, celle-ci montre Jésus en slip, et un soldat de plomb vert en train de braquer une banque, alors qu'à l'extérieur Bob l'éponge ne se prive pas de dégainer. La suite du film est une explosion d'idées mais aussi de formes et de couleurs. Le caldo (bouillon) que sert le bar du village a comme un goût de chaussette. Forcément, l'ingrédient secret des sorcières n'est autre qu'un pied humain ! Et dans les toilettes du bar, des yeux traînent au fond du trou, quand ce n'est pas une main qui vient vous chatouiller les fesses.
Enfant de la bande dessinée, le réalisateur reste influencé par l'esthétique des comics. La photographie du film, dans les tons jaune ocre, donne à l'image un côté un peu désuet, presque crade, contrastant avec les effets spéciaux employés.
Mais à force d'excès, le film accouche d'une orgie lors de la gigantesque scène du sabbat. L'hystérie la plus totale règne alors, et les effets spéciaux se superposent maladroitement, provoquant un désordre foutraque. Comme cette Vénus paléolithique qui prend vie, -immonde créature crasseuse-, et qui vient alourdir la fin du film. Alex de la Iglesia s'est-il laissé dépasser par son imagination démesurée ou assume-t-il ce débordement ? Quoi qu'il en soit, on lui pardonne, car malgré ce fouillis final, le film reste follement drôle et effrayant. Et ce grâce aussi à un casting de goût : Carmen Maura (Mujeres al borde de un ataque de nervios), Carlos Caceres (Los amantes pasajeros) ou encore Carolina Bang (Balada Triste) pour notre plus grand plaisir !
Une suite serait en prévision...
Elise Chevillard
Balada triste s'inscrit dans la continuité de l’œuvre d’Alex de la Iglesia qui revient, film après film, sur les mêmes thèmes. De Mes chers voisins à Mort de rire, il est toujours question d'un affrontement démesuré et sanguinaire entre deux individus ou deux groupes. Ces antagonismes permettent au réalisateur de dessiner le portrait d'une société... Lire la suite
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Né à Bilbao en 1965, Álex de la Iglesia exerce tout d'abord ses talents dans la BD, ce qui lui ouvre la porte du cinéma en tant que décorateur puis directeur artistique. En 1991, son court-métrage Mirindas Asesinas est remarqué par Pedro Almodovar qui produit son premier long, Acción mutante, en 1992 : à travers une approche gore satirique, il... Lire la suite