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Trente ans de séparation entre une mère et sa fille. Un chemin sinueux, tortueux, torturé par la douleur de l’absence et qui les amène à se retrouver. Madre, solo hay una. Mère et fille. Elles sont deux. Mais elles sont seules. Deux femmes à contretemps dans un huis-clos à ciel ouvert. Une danse des passés qui n’ont pas été.
Alors, face à cette immense solitude de l’enfant abandonné, restent deux options pour Chiara : Thanatos, ou l’expression violente d’un sentiment d’injustice et d’abandon, qui se manifeste tantôt par une conduite autodestructrice, tantôt par l’anéantissement des derniers souffles de vie alentours, dans le silence assourdissant d’un bord de lac. Ou bien la création, un pansement sur les plaies du passé ; en l’occurrence, des diapositives retouchées, ces images imaginées de moments qui n’ont pas eu lieu, des souvenirs-écran, découpés, reconstruits, qui sont autant de manifestations d’un désir de rapprochement, par l’acte artistique. Des clics et des clacs qui ponctuent le passage d’une séquence à une autre dans un jeu de mise en abyme du montage qui invite le public à partager cette poésie mélancolique. Elles sont fausses, ces images du passé reconstitué, mais elles semblent pourtant bien plus vraies que la coquille d’artificialité dans laquelle évolue Anabel, une tour d’ivoire clinquante et rutilante, un quotidien savamment orchestré, codifié, un monde de perfection, homologué et aseptisé, un masque d’apparences. Un monde que Chiara refuse, par son insolence provocatrice, son attitude décalée, contradictoire, imprévisible, instable ; et pourtant, elle sait où elle va, car face au silence et au vide, elle a choisi. Anabel ne sera « maman » que tard dans le film, et les deux femmes semblent tenter de vivre en accéléré, du manège de l’enfance perdue à la crise d’adolescence rebelle en passant par les sentiments violents de l’amour, la haine, la rancœur et la compassion, un temps qui ne sera plus. Magistral.
Film vu dans le cadre du festival de cinéma de Nantes en avril 2018.
Prix Jules Verne et Prix du Public.
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Audrey Louyer
Julieta marque le retour à une distribution essentiellement féminine et à une direction d'acteurs sans faute. L'ensemble des seconds rôles qui, hormis Rossy de Palma et Darío Grandinetti, travaillent pour la première fois pour le réalisateur, est aussi juste et performant que les deux actrices principales. Saluons également la photographie... Lire la suite