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Mais ce n'est ni de Charlie Hebdo ni de El Papus mais bien de Ajoblanco qu'il s'agit ici. C’est en effet aux prémices de la Transition qu’un groupe d’amis issus de milieux aisés conservateurs catalans décident de créer Ajoblanco. L’idée : provoquer, tuer le père, réfléchir et faire réfléchir, à un moment où l’Espagne a soif de liberté d’expression et de démocratie. Au début, les moyens sont dérisoires et les exemplaires bricolés à la main, pour atteindre une diffusion de plusieurs milliers d’exemplaires dans les années 90. Au-delà du travail exemplaire de recherche d’archives, très souvent inédites, de la qualité des intervenants ou encore du montage loin d’être anarchique, Ajoblanco, crónica en blanco y negro peut être vu comme une porte d’entrée sur l’histoire récente de l’Espagne.
A travers le prisme de l’épopée d’un média disparu et devenu culte, c’est en réalité le portrait d’une génération pré-Movida version Rambla qui est ici dressée. C’est ce besoin de revendiquer des droits, crier sa joie et sa haine à la fois. C’est la recherche d’un contre-pouvoir pour donner de la voix à des jeunes éclairés qui ne veulent pas être bâillonnés. Alors, rien que pour cette heure passée à la Cineteca de Madrid – Mecque de la programmation documentaire en Espagne -, le Festival DocumentaMadrid valait la peine d’être vécu. Preuve que le genre documentaire ne doit pas se cantonner aux postes de télévision.
Un genre d'ailleurs en pleine explosion de l'autre côté des Pyrénées : il représentait en 2014 45% des productions espagnoles, soit 6 points de plus qu'en 2013. Réduction des aides et possibilités de filmer désormais à bas coût expliquent en partie cette effervescence et l'éclosion de ce que la journaliste d'El País, Rocío García, qualifie de « nouveau refuge créatif ». Création et refuge, deux concepts qui, en somme, résument assez bien l'idée qu'on continue de se faire d'une salle de cinéma.