Films
Frida - Viva la vida
Documentaire réalisé par Giovanni Troilo, produit par B/Arts et Nexo Digital et distribué en France par Eurozoom. L’artiste n’est plus à présenter, le titre de Frida se suffit à lui seul. Difficile de faire un documentaire sur l’icône qu’était cette artiste du 20e siècle. Ses peintures ont largement dépassé les frontières nationales et continentales. Nombreux sont les points d’accroche qui nous relient au sujet ; ici, c’est bien l’ouverture d’une salle de bain et les objets qu’elle abritait qui deviennent l’événement pour célébrer, en la racontant, notre héritage, son Art.
Un documentaire que nous avions hâte de découvrir, plus par curiosité sur la manière d’explorer le sujet que pour son contenu, peu inattendu à ce stade des lumières déjà maintes fois projetées sur la figure centrale de Frida Kahlo. La forme est conçue pour happer le public le plus large, tout en éloignant polémique, frivolité ou discrimination. Le politiquement correct est de rigueur. Un peu dommage lorsque nous savons encore le voile convenablement tendu sur les sujets tels que les rapports de Frida aux autres artistes sur le continent américain ou européen (Dali est cité mais trop brièvement), à la politique (Trotski, El Che), au féminisme de l’époque, à ses propres racines mexicaines et aux références ethniques qu’elle utilise. Nous concevons que l’objectif ne se trouvait pas sur ces points mais que les données biographiques, exprimées tantôt par une mise en scène assez « chip » tantôt récitées froidement par Asia Argento, servaient plus à l’exploration de ses peintures, mises en lumière ici par la directrice de la Casa Azul.
Alors entre mots incrustés sur des collages d’images dynamiques, des plans en flottement pris autour et dans sa maison, des plans de drone au-dessus du nid de Coyoacán, les déplacements des « deux » Frida et une musique originale aux tonalités dramatiques, nous avons apprécié les extraits de films récupérés, ses propres mots déposés dans son journal ou ses notes, le visionnage et les éclaircissements d’œuvres rarement vues comme celle de Moïse ou le nucléus. L’écho des peintures nous a fascinés lorsque le documentaire a pris le chemin de la communauté de Tehuantepec avec les paroles de la grande photographe Graciela Iturbide que nous avions eu l’honneur d’écouter, il y a presque 10 ans, à Paris lors d’un échange sur ses clichés. Voilà le point fort du documentaire : une artiste qui parle d’une autre artiste, une artiste qui est fascinée par les mêmes éléments culturels que Frida Kahlo et qui nous les donne à voir avec le même regard aiguisé. Cette partie nous motive pour de plus amples recherches tant sur les objets découverts dans les malles, coffres et tiroirs, gardés secrètement dans la salle de bain fermée depuis 50 ans que sur leur origine. Ici, l’on comprend d’où viennent les œuvres artistiques franches d’une femme devenue icône : du savant mélange entre l’Art, la Société et les Femmes de sa terre.
« Ma peinture a pris la place de ces choses » disait Madame Kahlo. Et c’est bien ce postulat que nous illustre ce nouveau documentaire. La peinture qui prend la place des choses et le film est là pour nous les donner à voir.