Films
Los adioses
Deux acteurs et deux actrices incarnent les deux amants-époux-écrivains ; les nombreux flash-back nous montrent l'attirance, la sensualité, la passion mais aussi les points communs entre ces deux figures littéraires du Mexique. De la jeune et brillante étudiante qui part étudier à l'étranger à l'écrivain et poétesse reconnue, des amants au couple d'intellectuels, de la complicité à la rivalité.
Car la rivalité entre les deux penseurs est rapide : Ricardo, professeur de philosophie, est d'abord fasciné, flatté puis agacé par la prolixité et la popularité de son épouse : « Tu ne sais qu'écrire et écrire », lui reproche-t-il. Les hommages à son épouse lui font de l'ombre, et rapidement au plan personnel et quotidien la relation de couple se détériore. La relation est conflictuelle, malgré la naissance d'un enfant.
La situation serait banale et quotidienne sans la fragilité de la femme, partagée entre différents désirs, différentes exigences, qui sert de moteur à l'écriture. Sa difficulté à trouver et imposer sa place en font un personnage moderne et d'actualité aujourd'hui, qui concerne non seulement toutes les femmes, mais toute la société. Sa blessure créatrice est à la fois personnelle, ancrée dans une époque, mais aussi inconditionnelle de la condition féminine.
Les nombreux plans serrés, en champ et contre-champ, de très belles images, la rivalité mise en scène comme la sensualité, un jeu parfait des principaux acteurs -Karina Gidi, Daniel Giménez Cacho les adultes, et Tessa Ia et Pedro de Tavira Egurrola jeunes-, une reconstitution des costumes, ambiances de l'époque, un parallélisme inévitable avec une autre figure française du féminisme sont les principales qualités de ce second long-métrage qui a eu le succès escompté au festival mexicain de Morella, et à la fête du cinéma de Rome récemment.
On pourrait juste regretter une absence presque totale de contexte politique ou social, dans ce portrait de l'intimité très réussi, qui fait de ce conflit un sujet universel : la difficulté d'être une femme et une créatrice, la solitude restant le lot inévitable.
Film vu aux 19èmes Regards sur le cinéma espagnol et latino-américain, Valence. Mars 2018.