Films

Mourir à Madrid

Frédéric Rossif
Avec les voix de Jean Vilar, Suzanne Flon, Pierre Waneck, Germaine Montero, Irene Worth
France | 1963 | 1h25
Sortie en DVD le 22 Mai 2006
Un film contre la guerre civile
L'histoire de la Guerre civile espagnole des débuts de la Seconde République jusqu'à la victoire finale de Franco par Frédéric Rossif, le réalisateur de De Nuremberg à Nuremberg.
Mourir à Madrid fut l'un des premiers documentaires à sortir en salles sur le thème de la Guerre civile espagnole. Même en 1963, il n'était pas facile de réaliser un tel film en France. Le Gouvernement franquiste fit d'énormes pressions pour empêcher sa sortie. Il demanda d'abord de couper toutes les scènes susceptibles de ternir l'image de la dictature, puis proposa de racheter une fortune la copie du film. Les pouvoirs publics français empêchèrent sa sortie pendant près de deux mois. Frédéric Rossif reçu des menaces de mort. Mais grâce à la pugnacité de la production et du réalisateur, Mourir à Madrid put enfin être à l'écran le jeudi 18 avril 1963.

Mourir à Madrid est d'abord un formidable travail de récupération d'archives de la Guerre civile avec des documents d'Union Soviétique, des Etats-Unis, de France et d'Espagne. Le choix judicieux des images est servi par un texte magnifiquement interprété par Jean Vilar et Suzanne Flon. Certains voient dans Mourir à Madrid un film pro-républicain, alors que l'intention de Frédéric Rossif était avant tout de « faire un film contre la guerre civile ». On le voit en premier lieu dans son souci de donner des chiffres précis des morts des deux côtés. Sont aussi bien évoqués les massacres de prêtres perpétrés par les Républicains, que la purification des villes conquises par la rébellion franquiste. Une grande attention est également portée au choc idéologique entre "l'Espagne éternelle", tenancière des valeurs conservatrices, et l'Espagne républicaine laïque, progressiste, autonomiste.

On comprend que l'Espagne a été une sorte de laboratoire d'idées, l'anarchisme et le communisme côtoyant le fascisme de la Phalange. On prend aussi conscience de l'importance de ce conflit dans l'échiquier international. Pour l'Italie fasciste et encore plus pour l'Allemagne nazie, l'Espagne déchirée a été un terrain d'expérimentation militaire. C'est ici que sera inventé le concept de démoralisation des civils par le bombardement systématique des villes. Le massacre de Guernica en 1937 en est l'illustration la plus horrible. Pour les démocraties, cette guerre met avant en avant les contradictions de la France et de l'Angleterre, qui sont incapables de contenir les velléités des régimes fascistes. Frédéric Rossif s'appuie sur des citations des principaux protagonistes pour expliquer les tenants et les aboutissants du conflit. Une démarche qui fait de ce documentaire un outil pédagogique indéniable.

Supplément dvd

La réédition du film est complétée par un documentaire intéressant intitulé The Spanish Holocaust, qui fait de la Guerre civile un sujet toujours d'actualité en Espagne. Il est question des fosses où des milliers de civils, sympathisants réels ou supposés de la cause républicaine, furent assassinés. Des proches de ces victimes et des associations tentent aujourd'hui de les déterrer pour leur offrir une sépulture décente. Un film qui montre que la Guerre civile est encore un sujet tabou en Espagne et que les conflits originels sont toujours présents.

Thomas Tertois


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